Inventaire du patrimoine

La notion de patrimoine

Que peut-on considérer comme patrimoine ?

Dans le sens d’héritage des générations précédentes (latin « patrimonium », qui vient du père ), il convient de qualifier ce qui constitue ce « patrimoine », c’est-à-dire ce qui peut être digne ou utile d’être transmis.

Dans le domaine de la culture, le bâti témoignant de l’histoire ainsi que les biens mobiliers ayant une valeur artistique ont constitué les éléments traditionnels du patrimoine, quasiment depuis l’Antiquité, auxquels sont venus s’ajouter les témoignages archéologiques exhumés depuis  plus de deux siècles.

Cependant, telle statue de saint en bois ou carton-pâte doré et peint sans originalité, telle peinture d’apôtre gravement endommagée dans un lieu quasi déserté d’activité spirituelle, peuvent sembler aujourd’hui sans intérêt, ni émotionnel ni fonctionnel. Il n’en reste pas moins qu’elles ont servi de repères à des pratiques de foi qui ont guidé des siècles durant nos prédécesseurs sur ce territoire, qu’elles sont le produit d’artisanats florissants et de circuits économiques rôdés, qu’elles prouvent des réseaux d’échanges bien au-delà de nos cimes. Et que, bien loin d’être confinés dans nos vallées, les habitants d’ici ont participé aux courants religieux et politiques, aux échanges commerciaux régionaux, nationaux et transfrontaliers.

Outre la valeur historique et artistique, le bien immobilier et mobilier est aussi considéré dans une acception plus vaste, comme marqueur de l’activité humaine, qui s’inscrit dans le paysage en le modifiant. Par exemple les drailles, pâtures et cabanes gardent traces des pratiques anciennes dans la nature et dans la mémoire, pratiques qui ont forgé des savoir-faire, conditionné des modes de vie, charpenté des vies et des valeurs. Les vestiges abandonnés ou oubliés n’en restent pas moins éloquents sur la façon de vivre la montagne ; ils peuvent aussi alerter sur la sage expérimentation des ravages causés par les phénomènes naturels et le souci d’économiser l’espace rentable.

Cette notion de « patrimoine » s’est considérablement élargie, plus particulièrement au XXe siècle, par exemple aux productions économiques – ateliers manufacturiers, usines,  objets du design…-. Ainsi, sur le territoire de notre communauté de communes, le Service de l’Inventaire du patrimoine de la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur (« Sud ») a documenté et produit des ouvrages sur la distillerie de Barrême et la minoterie de La Mure, gérées par la régie Secret de fabriques, ainsi que sur le Chemin de fer de Provence, dit « Train des Pignes ».

A notre époque repue de technologie, prendre conscience de l’ingéniosité nécessaire pour irriguer les plans, fouler les draps, fabriquer de l’électricité, n’est pas anodin. Outre le respect dû aux peines prises par les Anciens, il peut y avoir aussi matière à réflexion pour une société qui commence à prendre conscience que le temps de consommer sans modération est révolu.

L’UNESCO en 2003 a ajouté la notion de « patrimoine immatériel » : traditions oralesarts du spectaclepratiques sociales, rituels et événements festifsconnaissances et pratiques concernant la nature et l’univers ou nécessaires à l’artisanat traditionnel.

La notion de transmission génère donc celle de la conservation : que doit-on conserver qui soit digne et utile d’être transmis ?

Le premier travail consiste à cet effet à dresser un inventaire de tout ce que l’on considère comme faisant partie du bien matériel, intellectuel et spirituel, des savoirs et savoir-faire d’un territoire donné, confiés aux bons soins de ceux et celles qui y résident.

C’est ce premier inventaire des biens matériels auquel s’est attelée Culture & Patrimoine, qui donne l’étendue de la richesse de ce patrimoine bas-thoramien, mais aussi celle de la tâche à mener pour  le documenter, le conserver et le valoriser correctement, au bénéfice de nos contemporains et des générations à venir.